Depuis quelques années une nouvelle méthode de recrutement se développe : le Job Dating. Ce dernier s’inspire du Speed Dating, en remplaçant simplement le duo Célibataire/Célibataire, par celui du Recruteur/Candidat, et en programmant dans les deux cas de courts entretiens entre les deux. Après la tinderisation du recrutement, pourquoi le staffing semble suivre d’aussi près les innovations du marché de la séduction ? Décryptage.
Le job dating c’est quoi ?
Le job dating a été inventé aux Etats-Unis dans les années 2000. Pendant une à plusieurs journées ( certains peuvent même durer jusqu’à 3 jours) des entretiens d’embauche très courts, de 5 à 10mins, sont planifiés entre
- les candidats, dont le but sera de décrocher un deuxième entretien
- les recruteurs qui vont rencontrer nombre important de candidats
Si le concept s’est développé dans le monde entier ces dernières années, c’est que le recruteur y a trouvé de nombreux avantages, comme par exemple :
- Rencontrer un maximum de candidats dans un minimum de temps, alors que les chargés de recrutement passent généralement plus d’une heure par candidat pour la présélection
- Donner une chance égale à tous les candidats. Il permet de dépasser les phénomènes de “clonage” des recrutements qui ont tendance à desservir le dynamisme et la créativité des entreprises.
- Le job dating permet enfin aux recruteurs de valoriser la marque employeur et ainsi communiquer positivement sur la vie dans l’entreprise. Qu’il fait bon de travailler chez nous, il y a du café gratuit et un babyfoot !
Les recruteurs utilisant le job dating soulignent cependant certaines limites du procédé. Comme par exemple :
- Le procédé n’est pas adapté à certains types de poste, notamment les pénuriques. Le job dating n’est pas adapté au recrutement d’un développeur, en tout cas pour l’instant.
- Le nombre de désistements est important. Il est important de limiter le délai entre l’annonce et le déroulement du job dating, pour ne pas perdre trop de candidats.
- Enfin, « le nombre de participants aux évènements est en baisse » souligne Jeremy Pusiol, responsable des Ressources Humaines au sein de Villages Club du Soleil. Le job dating semble en effet souffrir d’une désaffection progressive des candidats.
Si le job dating présente ses caractéristiques propres, avec ses avantages et ses inconvénients, force est de constater qu’il n’est qu’un symbole d’une tendance plus générale : le recrutement emprunte de plus en plus d’outils aux mondes de la séduction et du marketing.
Job dating/speed dating : symbole d’une tendance de fond ?
En effet, le job dating n’est pas le seul format emprunté par le recrutement aux relations amoureuses. C’est même une tendance constatée ces dernières années. Avec, par exemple :
- Le matching : Initialement utilisée par les applications de rencontre, les outils de matching sont devenus sémantiques pour le recrutement. Elles permettent non pas de matcher 2 profils, mais une offre d’emploi avec un CV.
- La marque employeur s’est fortement développée ces dernières années, surtout pour recruter des profils pénuriques. Les entreprises savent désormais qu’elles doivent vanter le bonheur absolu que cela représente de travailler chez elles.
Comment expliquer cette tendance ? On peut penser que la symétrisation du rapport Recruteur/Candidat y joue beaucoup. Si le mythe du “Candidat Roi” a ses limites, il est clair que le rapport s’est équilibré. Les entreprises, autrefois en position de force, doivent désormais, elles aussi, “séduire” le candidat, dans un nouvelle status quo inédit…comparable aux processus de séduction classiques. Les entreprises ont vite compris qu’elles devaient se plier à l’exercice, en effet :
- Chaque recrutement demande de plus en plus de temps aux professionnels du secteur. En 2018, l’APEC estime à 9 semaines la durée moyenne d’un recrutement de commercial.
- Une erreur de casting peut se révéler extrêmement coûteuse, en termes financier, mais également humains, avec des impacts sur le long terme difficiles à rattraper.
Optimiser leurs embauches est donc un enjeu chaque jour plus majeur pour les entreprises. Si, au fond, recruter a toujours consisté à séduire, la symétrisation des relations a emphatisé les points communs entre ces deux activités. La récupération des outils de rencontres par l’industrie du recrutement en est la preuve. De là à affirmer que les Job Daters doivent s’inspirer de Cléopâtre ou Casanova, il n’y a qu’un pas : manipulateurs hors pair, ils auraient sans doute été aussi bon candidats que recruteurs.